Compte-rendu sur la prestation de Jean-Marc Rouillan à la librairie Résistances

[Texte reçu par mail]

Misère du marxisme-léninisme

Compte-rendu sur la prestation de Jean-Marc Rouillan à la librairie Résistances

Pour ceux et celles qui ne la connaissent pas, je rappelle que Résistances, tenue par des tiers-mondistes d’origine plus ou moins marxiste-léniniste, est l’un des principaux centres de ventilation de l’idéologie pro-palestinienne à Paris. Vu la taille du lieu, qui tient plus du petit centre de conférences que de la librairie habituelle, j’aimerais bien savoir qui sont les généreux donateurs. En tout cas, les positions des gestionnaires de Résistances impliquent aujourd’hui le soutien au Hamas, la multiplication de conférences avec des personnes aussi peu présentables que la complotiste Diana Johnstone, la même qui accusa, ces dernières années, les black blocks d’être des provocateurs au service de la police. Johnstone est soutenue par des négationnistes comme Jean Bricmont et Michel Collon, défenseurs de « la liberté d’expression » pour Robert Faurrisson, le célèbre « ami de la cause palestinienne », régulièrement invité à présenter ses thèses négationnistes au pays du caviar et de l’intégrisme d’Etat, l’Iran.

Je suis arrivé assez tard à la séance de présentation du dernier bouquin de Rouillan, Je regrette. Mais suffisamment tôt pour le voir enfiler des perles rares sur à peu près tous les sujets, en roulant des mécaniques à l’usage des jeunes néophytes qui s’étaient déplacés pour l’écouter. Je résume : sur l’histoire révolutionnaire en France à partir de Mai 68, il a fait l’apologie de la Gauche prolétarienne ; sur le rôle de la poésie dans la pensée révolutionnaire, celle des créateurs de la poésie prolétarienne, à la fin des années 1920, précurseurs du réalisme socialiste stalinien ; sur l’activité révolutionnaire en cercles affinitaires, celle du parti à la mode léniniste ; sur l’impérialisme, celle du tiers-mondisme, particulièrement en version palestinienne ; et, sur le syndicalisme, celle de la CGT ! Je ne blague pas. L’ensemble ponctué de lamentables justifications du genre : « Je ne suis pas supporter de Daesh, même des camarades ne l’ont pas compris. » Allusion à la récente prise de position de Claude Guillon contre lui, dans la foulée de l’affaire du Bataclan.

La grande majorité des personnes présentes étaient, à des degrés divers, d’obédience syndicaliste, façon CGT et SUD. Elles l’ont donc applaudi sans complexe, en particulier lorsqu’il a affirmé que l’une des grandes erreurs des « cortèges de tête », dans les récentes manifestations parisiennes, avait été de « se séparer de la CGT » ! Les quelques poignées de jeunes néophytes sans étiquette particulière, qui avaient eu l’occasion de voir le service d’ordre CGT en action, voire de s’y confronter, n’en croyaient pas leurs oreilles. Ils ont commencé à protester, du fond de la classe, vite censurés par l’une des maîtresses des lieux qui les a rappelés à l’ordre, sous prétexte que l’heure n’était pas « à la polémique contre le camarade, déjà menacé par l’Etat ». Lequel camarade, face à l’une des questions posées sur le rôle du SO de la CGT, n’a rien trouvé de mieux à dire qu’« il y a des crétins à la CGT comme ailleurs » et qu’il ne fallait pas « oublier que le principal objectif de l’actuel pouvoir est de détruire la CGT » !

Nous voyons donc ce que « regrette » Rouillan et en quoi consiste la « tradition révolutionnaire » qu’il compte « rappeler aux très jeunes révolutionnaires d’aujourd’hui ». C’est, y compris en matière de poésie, celle du marxisme-léninisme. Il est donc naturel qu’il soit reçu à bras ouverts, pour présenter son opuscule, par les principales unions locales de la CGT, du Havre à Amiens, en passant par Paris, et par des officines du genre de Résistances.

La fin de la réunion, vu que j’avais pris partie pour des jeunes perturbateurs potentiels, a failli tourner à la bagarre avec l’une des membres de la Fédération des travailleurs des industries du livre, du papier et de la communication (Filpac), fédération que je haïs particulièrement pour ses multiples infamies, en particulier pour la chasse aux sorcières qu’elle organise dans ces secteurs. J’en parle en connaissance de cause. Je rappelle que, parmi les bureaucrates en chef du Syndicat des correcteurs, puis de la Filpac, on retrouve l’un des ex-membres présumés d’Action directe. Bref, la néo-stalinienne de service, accompagnée de deux ou trois supporters, m’a donc traité de « sale anarchiste », de « destructeur du syndicalisme », etc. Elle a même affirmé que des « individus dans mon genre auraient dû être chassés de la librairie ». C’est beau la « liberté d’expression » ! J’ai commencé à gueuler contre cette attitude de nervis staliniens, y compris celle de la Filpac dans les dernières manifestations, et dans la mesure où quelques lycéens commençaient à intervenir, le trio a préféré disparaître. Seul intérêt de la soirée, j’ai pu discuter avec quelques personnes plus critiques que la  moyenne, et leur diffuser la critique d’Action directe datant des années 1980 : Aux armes, mégalos ! •

Julius, octobre 2016

Pour toute correspondance : julius75@free.fr

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Aux larmes, mégalos ! pourra être trouvé ici

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